Personnage
Nom : Satsujah
Prénom : Karou
Rang : La guêpe messagère
Âge : 31 ans, du moins, 31 ans de souvenirs.
Sexe : Féminin. Sans doute. Majoritairement.... Enfin, en général.
Race : Demi faux-parleur
Phrase de faux parleur :
"Des hirondelles hagardes s’envolent dans le ciel bleu"
Elle commence souvent ses crises en répétant "le ciel est bleu" d'un air paniqué, espérant prévenir les personnes qui l’entourent du massacre imminent. Malheureusement, peu nombreux sont ceux dont l'instinct de survie est suffisamment développé pour comprendre qu'il est alors grand temps de se mettre à courir.
Classe : Métamorphe
Métier : Messagère
Croyances : Pas de religion à proprement parler, mais elle aime à croire qu'il existe, quelque part, peut être partout, une conscience, un Cycle, une Magie, quelque chose qui permet au monde de tourner et aux êtres de se fixer.
Groupe : Rebelles
Équipement : • Une
besace et un petit sac à dos, contenant, entre autres, un
nécessaire de voyage : de quoi coudre, cuisiner, soigner, des affaires de rechange, quelques portions de nourriture séchée...
Des carnets, aussi, où elle déverse ses pensées quand l'envie lui prend.
• Une
aiguille très fine, d'une vingtaine de centimètres de longueur, en métal cuivré accrochée sous ses vêtements, qui lui a valu son surnom de guêpe. Ce n'est pas exactement une arme conventionnelle, aussi parvient elle parfois à surprendre ses ennemis avec.
• En matière de vêtements, elle porte le plus souvent une tunique courte d'un vert délavé, passée sur un pantalon ajusté d'un beige sali par la poussière des routes, le tout sous un pourpoint de cuir élimé. La plupart du temps, elle s'enveloppe également d'un long manteau noir à capuche, vêtement courant chez les voyageurs, qui lui évite d'attirer l'attention et lui permet de cacher ses maigres possessions.
• Un
chien, si on peut parler là d'équipement, au poil long roux comme celui d'un renard, assez court sur pattes et à la queue touffue. Son oreille gauche, cassée, lui donne un air perpétuellement interrogateur et malicieux. Il est plutôt intelligent, très fidèle et obéissant. Il ne parle bien entendu pas, et c'est sans doute cette qualité qui en fait la seule créature dont elle supporte la compagnie au long terme. Il porte le nom de
Reinar, en référence à son apparence, même si la plupart du temps elle se contente de l'appeler Crétin. Avec la plus grande affection du monde, bien sûr.
Ce qu'elle ignore, c'est que ce chien n'est pas à proprement parler un chien. C'est un syrinx, un
syrinx animal, comme cela arrive parfois. Il s'est échappé du Vein pour mener une vie plus adaptée sur Feleth il y a de cela une vingtaine d'années maintenant. Si d'aventure quelqu'un venait à le raser, il découvrirait, au creux de ses épaules, une marque en forme de champignon étrange, orné de pétales dentus. L'état d'éclosion de celui-ci pourrait indiquer à celui ou celle qui s'y connaît que l'animal a encore de belles années devant lui. Karou, elle, se demande simplement comment le chiot qu'elle a ramassé au bord de la route une vingtaine d'années plus tôt peut encore courir si vite et paraître si
jeune.
Talents de combat physique : Son plus grand talent dans le domaine des arts du combat serait sans doute... hm, oui, la fuite, indéniablement. Courir, vite, esquiver, agilement, et changer de visage, de silhouette, pour qu'on ne la reconnaisse plus. En général, ça fonctionne plutôt bien.
Quand le combat n'est pas aussi facilement évitable en revanche, ou qu'un besoin de diversion se fait sentir, elle dévoile sa vague maîtrise de l'aiguille, et de tous les petits trucs qui piquent (bâton, dard, moustique...). Toute en rapidité, en précision, son manque de force physique reste sa plus grande faiblesse. Elle est redoutable lors d'une attaque surprise, mais ses chances de survie en vrai combat sont... limitées. Pour le moins.
Sauf, peut être, quand elle récite sa phrase. Il lui suffit de modifier légèrement la forme de ces doigts, de faire couler la kératine jusqu'à ce que ses ongles deviennent griffes, de laisser pousser ses crocs... Mais sa puissance reste très réduite.
Talents de magie : Karou est une métamorphe. Cela signifie qu'elle est capable, selon ses désirs, ses besoins, de changer son apparence en n'importe créature humanoïde, tant que sa taille reste raisonnablement proche de la sienne. Elle se base sur l'apparence de personnes qu'elle a déjà rencontré, cela étant plus facile pour elle. Plus amusant, aussi, quand elle peut mettre des personnes qu'elle n'apprécie guère dans des situations pour le moins embarrassantes. Une métamorphose complète s'avère souvent désagréable et légèrement douloureuse. Au contraire, la modification du visage, ou d'un membre, ressemble à une bouffée d'air frais. On pourrait le comparer au besoin de se faire craquer une articulation : on sait que ce n'est pas vraiment bon pour nous, mais on a besoin de le faire.
Ce don lui demande une grande dépense d'énergie, aussi ne peut elle se transformer entièrement au maximum que deux fois par jour. Et encore, elle ne pourra pas réitérer l'exploit tout de suite...
Elle évite d'utiliser ce don devant témoins, préférant garder cet atout dans sa manche. De fait, très rares sont ceux connaissant sa nature.
Talents divers :Elle sait très bien cuisiner la tarte aux mûres. C'est là sans doute son talent principal.
Sinon, au delà de ses aptitudes culinaires, elle est douée d'une excellente mémoire et d'une très bonne imagination. Elle n'oublie jamais un visage, jamais un message.
Elle a également reçu une plutôt bonne éducation, et sait donc lire, écrire, compter. Elle a aussi de bonnes notions de politique, d'histoire et de géographie, à force de véhiculer des informations.
Enfin, elle possède un excellent sens de l'orientation, ce qui s'avère plutôt utile lors de ses voyages.
Pouvoirs particuliers : Elle n'est pas, comme certains autres métamorphes, capable de faire oublier son propre visage. En revanche, elle peut, grâce à ses faibles talents d’illusionniste, camoufler la présence ou même l'existence d'un objet, d'une plante ou d'un animal aux yeux des curieux. Les yeux glissent dessus mais l'esprit l'oublie aussitôt, et ce n'est plus qu'une flaque d'ombre, une maigre distorsion de la réalité, un rêve que l'on sent, mais qu'on ne peut attraper.
Elle utilise souvent ce don pour faire oublier son chien, qui pourrait trop facilement révéler son identité. Cela fonctionne très bien, tant que l'animal ne fait pas de bêtise et n'attire pas l'attention sur lui.
Apparence physique : Femme, homme, vieillarde, elfe, orque... Elle peut être tout et rien à la fois.Pourtant, si ses talents de métamorphe lui permettent de fondre sa chair pour ressembler à n'importe quelle créature humanoïde, il y a bien une chose, une petite chose, qui permet peut être de la distinguer sous son déguisement. Cette petite chose, cette constance dans cette incertitude faite chair, c'est ses yeux, des yeux de fantôme, d'un vert-bleu presque trop clair cerclé de charbon.
C'est le seul lien qu'elle entretient avec son ancienne vie, celle qu'elle serait curieuse de connaître, parfois. Mais voilà, elle ne se souvient pas. Elle ne sait pas qui elle est. Elle ne sait même plus si elle est... Elle.
Il lui est cependant apparu rapidement que pour entretenir une vie sociale basique, et aussi pour exercer son métier de messagère, il était assez... disons, utile, de garder la même apparence. Elle a donc opté, en toute logique, pour la première qu'elle s'est connue : sans doute pas la première qu'elle ait porté, mais faute de mieux...
C'est donc les cheveux longs et la taille haute qu'elle arpente les routes de Feleth. Sous cette apparence, elle doit approcher du mètre soixante-quinze, et possède une certaine forme de grâce qui ne passe pas inaperçue. Elle n'est pas exactement mince, mais ses membres restent relativement fins, taillés pour la course, la vitesse. Sa chevelure châtain lui tombe jusqu'au milieu du dos, et s'avère très utile pour masquer ses traits lorsqu'elle désire rester discrète. Ceux-ci, finement ciselés, pommettes hautes, yeux étirés et lumineux, bouche pleine perpétuellement étirée d'un sourire un brin sarcastique, annoncent son caractère enjoué et inspirent la confiance. Elle n'a pas pour habitude de masquer ses émotions, et sous cette forme, son visage est très expressif.
Caractère, personnalité :Karou aime la solitude. Cela ne veut pas dire qu'elle est asociale, ni qu'elle fuit les villes ou les villages, au contraire. Mais voilà, ces longues périodes de marche entre deux missions la ressourcent, lui apaisent l'esprit, nourrissent son imagination et entraînent ses pensées dans des recoins qu'elle serait incapable d'explorer plus proche de la civilisation.
Elle aime parler, plaisanter, manier les mots et les tons. D'un naturel altruiste, elle ira vers les gens lui semblant en détresse, ou tristes, ou malades, ou perdus.
Elle en arrive presque à être naïve, inconsciente, parfois. Elle a tendance à inviter un inconnu à partager son repas, bien avant de ses demander s'il n'est pas, par hasard, du genre à manger les gens vivants. Mais heureusement pour elle, elle est également dotée d'une chance impressionnante, voire totalement injuste. Plus que ses aptitudes de combat (non, ne riez pas, c'est vexant) ou de fuite, c'est cette chance qui lui a sauvé la vie quand elle se trouvait dans des situations délicates.
Mais malgré ses penchants amicaux, la jeune femme ne se lie que rarement. À part ses quelques clients réguliers, on ne lui décompte que peu d'amis. Un seul, à vrai dire. Et c'est aussi bien comme ça : ainsi, personne n'est là pour entendre sa phrase, personne n'est là pour être déchiqueté, pour la tuer un peu plus de l'intérieur. Car elle est là, vous savez. Elle est toujours là, une toute petite part d'elle, consciente, quand elle devient cette machine à tuer folle furieuse. Elle ne peut rien faire, bien sûr, mais elle le voit.
C'est pour cela que lorsqu'elle sent la phrase venir, tâter ses lèvres à la recherche d'une ouverture, son esprit à la recherche d'une porte, elle essaye de prévenir son entourage. Bon, la manière n'est peut être pas idéale, mais elle serait bien en mal de faire mieux. Ses « crises » peuvent frapper à n'importe quelle occasion, mais elle a remarqué, avec le temps, qu'elles arrivaient plus souvent lorsqu'elle apercevait une hirondelle. C'est pour cela qu'elle est désormais terrifiée par cet oiseau.
Histoire : - Prologue :
Karou est bien une femme.
Elle est née il y a longtemps, très longtemps, dans un petit village au creux de la sylve. Un petit village calme, où elle a grandi, où elle a fait sa vie, où elle a vieilli sans que son visage de femme de vingt-sept ans ne change. Un petit village calme, trop calme pour être doté d'une garde efficace. Un petit village calme qui a, un jour, eu le malheur d’exciter la convoitise des pillards.
Pillards qui ne se sont pas gênés pour tout dévaster.
Pillards qui ont violé, tué, torturé, profité.
Karou était là. Elle ne s’appelait pas comme ça à l'époque, bien sur, mais elle était là.
C'est à ce moment que ça première véritable crise de faux-parleur frappa. Véritable dans le sens où cette fois, quelqu'un était là pour l'écouter.
Paniquée, elle commença à répéter sa phrase, cachée dans sa chaumière. Un brigand qui passait par là l'entendit, déclenchant sa folie. Il ne s'attendait pas à la trouver ainsi, dans cet état, toute de chair refondue et de griffes mal placées : grâce à l'effet de surprise, elle le tua.
Fort heureusement pour elle, personne d'autre ne l'avait entendue, et elle pu fuir sans ressentir le besoin de se jeter dans les bras d'autres tueurs, continuant de réciter son petit poème.
Elle parvint à se calmer une fois arrivée sous les frondaisons, et sa phrase mourut d'elle même dans sa gorge. Elle ne pris pas le risque de ralentir l'allure cependant, et continua à courir vers son salut, laissant son passer flamber derrière elle.
A aucun moment elle n'avait pensé que la route pourrait être barrée.
Les pillards n'étaient pas totalement stupides : ils avaient laissé des hommes sur le chemin, plus supposés empêcher les gens de rentrer que de sortir d'ailleurs.
Ils étaient cinq. Elle ne pu pas les prendre par surprise.
La suite fut un peu trop violente, sanglante, dégradante et traumatisante pour son esprit : c'est avec un doux abandon qu'elle se laissa aller aux ténèbres de l'inconscience.
Et le vide de l'oubli l'avala toute entière.
Elle se réveilla au moment ou le soleil enflammait l'horizon, transformant le ciel nuageux en une palette merveilleuse de nuances d'ocre, d'or, de rose et de bleu. Elle ne savait pas où elle était, juste qu'elle était sous ce ciel immense, et que le monde était terriblement beau.
Il lui fallu quelques instants pour se souvenir qu'elle était faite pour bouger.
Alors, elle se leva, et, tête toujours tournée vers le ciel, elle attendit que l'astre sombre, des larmes innocentes plein les yeux. Après, seulement, une fois les ténèbres revenues, elle s'autorisa à se poser les question essentielles.
Qui était elle ?
Qu'était elle ?
Elle commençait à retrouver ses savoirs, ses notions. Elle connaissait le monde, elle connaissait les choses. Mais elle ne se connaissait plus, elle.
Rapidement, elle regarda autours d'elle. Elle reconnu, sans trop savoir comment, une forêt qu'elle sentait familière, une route, qu'elle savait aller vers un grand village fleurit, dont les fumées s'élevaient au loin dans le ciel déjà piqueté d'étoiles.
De trop grosses fumées.
L'odeur de l'incendie parvint enfin à ses narines, et la jeune femme s’aperçut que le soleil n'avait pas été la seule chose à embraser le ciel, plus tôt.
○O○
Karou. Karou Satsujah.
C'est ainsi qu'elle avait décidé de se nommer, quelques années plus tôt, peu après que son passé ait été réduit en cendres. Cela faisait bien cinq ans, maintenant. Cinq ans et elle n'avait pas changé d'un pouce. Enfin... Sauf quand elle le désirait, bien sûr. Elle n'avait pas tardé à découvrir ce don étrange. Il lui suffisait d'une pensée, d'une traction mentale.. Et son être entier changeait. Comment, alors, être sure que le corps qu'elle s'était habituée à porter était bien le sien? Comment pouvait elle se fier à cette identité ?
La réponse était venue rapidement : elle ne pouvait pas, et il fallait faire avec. Les cendres du passé devaient devenir le terreau de l'avenir, et étrangement, elle ne se sentait pas si désireuse de retrouver ses souvenirs. Elle sentait que la souffrance couvait, tout près, et elle n'avait aucune envie de la réveiller.
Elle avait beaucoup voyagé, depuis. Elle n'avait d'ailleurs pas tardé à se découvrir une grande curiosité, une envie d'apprendre dévorante, et avait écumé les bibliothèques pendant un long moment. Puis ça lui avait passé. Pas parce qu'elle n'aimait plus lire, loin de là.
Parce qu'elle avait envie de vivre. D'apprendre par elle même, au contact de ce monde merveilleux.
Alors elle était partie sur les routes.
Et, pour célébrer ses un an de survie en territoire sauvage, la vie lui avait offert Reinar.
○O○
La vie d'ermite plaisait beaucoup à Karou. Pas d'attache, pas de bruit... Personne pour se demander pourquoi, en quinze ans, cette petite humaine n'avait pas changé, pas pris une ride. Personne pour être jaloux. Personne pour la lyncher au coin d'une rue. Personne à tuer, quand elle entrait dans une de ses crises, non plus.
Oh, bien sur, elle aurait pu se transformer en elfe, ou en créature du style, au vieillissement plus lent. Mais elle était attachée à cette forme, et se refusait à l'abandonner. Alors elle allait de ville en ville, de village en hameau. C'est au cours de ses pérégrinations sans véritable but qu'elle rencontra un mage : Eiroh. Il était ancien, courbé par les ans, poilu plus que de raison. Il était jeune, fringant, à l’œil vif et malicieux. Il était tout, il était rien.
Il était illusionniste.
Et c'est de lui qu'elle dira son savoir.
Elle ne connu jamais son vrai non, jamais sa véritable apparence. Pas qu'il ne lui ai jamais proposé de le voir dans toute sa vérité : leur amitié était profonde, et il aurait vraiment aimé se dévoiler à elle. Mais elle refusa, refusa et refusa encore : elle ne méritait pas de voir sa véritable apparence si elle ne pouvait lui révéler la sienne en retour.
Elle passa cinq ans en sa compagnie, appris les bases de son art, puis reparti. Sur la promesse de revenir, un jour, peut être sous son vrai visage, les poches remplies de fragments d'aventures.
Ce fut très naturellement, au final, qu'elle devint messagère. Les villageois commençaient à la connaître, à lui faire confiance, parfois.
Sa première cliente fut une jeune femme qui voulait annoncer la naissance de sa fille à sa famille, de l'autre côté des plaines. Le deuxième, un vieillard, qui appelait à lui ses enfants, sentant sa fin venir. La troisième, une marchande voulant passer contrat avec un autre. Le quatrième...
Le quatrième fut un rebelle.
○O○
Karou ne s’était jamais sentie très concernée par ces luttes de pouvoir et de domination. À la limite, les capes blanches la dégoûtaient un peu, mais elle se contentait de les éviter et en général, tout se passait bien.
Mais après avoir transmis son premier message au groupe de rebelles du petit village, sa vision des choses changea. Elle aperçue enfin qu'il y avait quelque chose de malsain dans cet état des choses, que tout n'était pas comme il devait être.
Alors, elle décida d'embrasser la cause de la rébellion, pas par vengeance, pas par haine, mais à cause d'une envie véritable de faire changer le monde. De faire ce qui est juste.
En ce qui vous concerne
A quelle fréquence serez-vous présent sur le forum ? Assez souvent, je dirais. Sans doute plusieurs fois par semaine.
Comment avez-vous découvert le forum ?En regardant par dessus des épaules. Et avec une sacrée mémoire, aussi.
Quelles remarques pouvez-vous formuler à propos de l’apparence du forum ?Eh beh.. Il est sombre, il est glauque, il est impitoyable, il est donc parfait !
Test-RP
Il pleuvait en ce jour sur les terres de Feleth.
Enfin, du moins, il pleuvait en ce jour sur ce coin précis des terres de Feleth. Cela suffisait. Et c'était désagréable.
Tirant une longue langue rose et fumante, Reinar s'assit près de sa maîtresse, partageant avec elle la douce chaleur de sa fourrure. Ils s'étaient réfugiés sous un amas de troncs et de rochers dérangés lors d'une précédente tempête, non loin du sentier, lorsque la pluie était devenue trop insistante. Karou avait déjà retiré son manteau trempé et tentait désespérément de trouver de quoi boucher la fuite qui perçait de leur toit de fortune.
Ce n'était pas qu'elle n'aimait pas la pluie. La pluie était une nécessité, une bénédiction pour les plantes et la terre sèche. Non, ce qu'elle n'aimait pas, c'était quand l'eau se faisait omniprésente, rampant sur le sol et noyant les racines, tuant aussi sûrement que du feu. Et puis, il faisait froid, maintenant. Et le froid humide, ce n'était pas franchement l'idéal du voyageur, surtout quand le soleil finissait de s'abîmer derrière la ligne de l'horizon.
Fort heureusement, les quelques brindilles que le vent avait laissé là étaient encore à peu près sèches, et n'attendaient qu'elle pour s'enflammer gaiement. Quelques frottements plus tard, une flammèche dansait joyeusement dans un cercle de petites pierres, ignorante des tentacules d'eau qui s'approchaient déjà, curieuse, de son refuge précaire.
Karou soupira. Elle aurait vraiment aimé arriver au village avant la nuit. Elle avait des messages urgents à délivrer, et elle commençait à venir à bout de ses réserves de fromage et de viande séchée. Oh, elle pouvait chasser, bien sûr, et récolter quelques baies sur son chemin, elle connaissait assez bien sa botanique pour ne pas s'empoisonner accidentellement. Mais ça prenait du temps. Et elle n'aimait pas vraiment fourrer ses mains dans les entrailles des animaux pour les vider. Les bouchers et les capes blanches étaient là pour ça.
Soudain, un craquement de branche la tira de ses ruminations. S'en suivirent un « plouf » très peu discret et un râle douloureux.
Karou échangea un regard avec Reinar. Il n'avait pas grogné, et semblait calme. D'ordinaire, elle se fiait entièrement à son instinct, car il avait le don, dans la forêt, de sentir mystérieusement tout danger approchant. S'il n'avait pas réagit, c'était que la créature qui avait émit ces sons n'était pas une menace. Mais elle semblait mal en point.
La jeune femme pris rapidement sa décision.
«
Bouge pas. » Souffla-t-elle tout en tendant, par réflexe, un voile d'illusions autour de la silhouette de l'animal.
Cela fait, elle se leva et sorti, courbée, de leur abri de fortune. Elle n'eut pas de mal à localiser la source du bruit : là, à quelques pas devant elle à peine, avachi près d'une flaque profonde, se trouvait un homme. Il avait l'air salement amoché, avec ses vêtements crottés de boue et de sang à peine coagulé.
Karou se précipita vers lui, et, rapidement, passa un bras autour de sa taille pour le traîner au sec. L'homme s'appuyait lourdement sur elle, incapable de se déplacer seul ni de coordonner suffisamment ses mouvements pour l'aider. Alors, à la lumière des flammes, elle pu voir l'origine de la faiblesse de l'homme : une branche brisée épaisse comme son poignet dépassait de son flanc droit, couverte de sang. Vu la quantité de liquide qui imbibait le tissus et le teint blafard de l'inconnu, il n'en avait plus pour longtemps.
«
Je... J'ai glissé ». Il eut un rire nerveux qui s'étouffa dans une toux sanglante. «
J'ai glissé et je suis tombé. C'est.. c'est bête, hein ? De partir comme ça... »
Karou lui posa une main réconfortante sur l'épaule. Elle n'était pas guérisseuse, elle ne pouvait rien faire pour lui. Et elle savait depuis longtemps que la mort ne frappait pas toujours avec décence et dignité.
«
T'as pas de chance, je suis messagère, pas médecin, j'ai rien qui puisse... Ah, si, je dois avoir des herbes dans mon sac, ça devrait réduire la douleur. Attend un instant, tiens bon. »
Elle allait se détourner pour fouiller dans son paquetage, mais l'homme la reteint, et sa poigne était surprenamment ferme pour un mourant.
«
Messagère ? » Son visage était figé, sérieux. Le visage d'un homme qui puisait dans ses dernières réserves. «
Messagère pour le compte de qui ? »
«
De ceux qui me demandent mes services... Et qui tiennent à la discrétion ».
«
Alors écoutes bien, parce que je vais te les demander, tes services... »
Et l'homme parla, encore et encore jusqu'à ce que son souffle s'étrangle et que l'écume rouge qui perlait à ses lèvres l'engloutisse. Quand il mourut enfin, Karou ne réagit pas, pensive.
Puis, bien plus tard, alors que le soleil pointait à l'horizon, elle se leva et parti.
Sans un mot, sans un regard.
Juste un nom, qui pulsait dans sa tête. Un message à délivrer.
Un client.
Un rebelle.