Les orques …

Quelle autre race du monde du milieu peut se vanter d'être aussi fière de son passé ?

Mais en même temps, quelle autre race peut se vanter d'avoir un tel passé ?

Il existe de nombreux grands héros orques, de grands guerriers ou de puissants mages qui ont aidé leurs clans respectifs à prospérer ou alors juste à survivre dans les grandes plaines de Feleth ou ailleurs. Ces gens ont tellement fait pour leur race que leurs histoires méritent d'être racontées. Mais toutes les raconter prendrait une infinité de temps, et les retranscrire serait également impossible, même en mobilisant tous les volontaires possibles. Mais certaines de ces légendes, plus importantes que d'autres, sont transmises de générations en générations, de manière orale, au cours de grandes veillées estivales autour d'un feu ou lors des longues soirées d'hivers, lorsque le vent glacial s'engouffre dans les refuges provisoires. En voici quelques unes …

« La légende du grand guerrier Vrarg, du clan Runak »

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[Illustration de Vrag lançant sa fameuse attaque à la hache, dessinée par un autre membre du clan Runak quelques jours seulement après leur évasion de la gorge enneigée]

À première vue, c'était un clan orque comme un autre.
Des dizaines de tentes, installées en cercle autour d'une plus grande tente, celle du chef du clan. Celui-ci avait droit aux meilleures choses, à un plus grand confort mais il devait fournir sa part de travail également. Même s'il y avait une hiérarchie, personne n'était exempt de corvées. Le titre de chef était avant tout honorifique et servait à désigner officiellement un représentant en cas de conflit mais le chef n'était, en théorie, aucunement supérieur aux autres membres du clan, même si, dans les faits, on ne choisissait pas n'importe qui pour devenir chef, effectivement. Bien souvent, on prenait le meilleur orateur, ou le chasseur le plus talentueux ou encore le guerrier le plus valeureux. Il fallait ce qu'il y avait de mieux pour représenter le clan et quoi de mieux que quelqu'un s'étant illustré au sein du clan pour prendre ce rôle ? Il n'était donc pas surprenant de retrouver bon nombre de héros à la tête de grands clans orques.
Pourtant, ce n'est pas d'un de ces chefs de clans dont je vais vous parler aujourd'hui. Non, car ce n'était pas un héros comme les autres, c'était plus que ça et c'est maintenant une légende parmi les siens.

Vrarg était un simple membre du clan Runak. Il ne s'était jamais vraiment illustré, quelque soit le domaine dans lequel il avait exercé. Il n'était pas mauvais, loin de là, mais il y avait toujours quelqu'un qui le surpassait. Un guerrier qui le battait toujours en duel, un chasseur qui ramenait toujours plus de gibier que lui ou bien un orateur contre lequel il arrivait à bout d'argument avant lui. Il excellait dans tous ces domaines sans être le meilleur mais cela ne le dérangeait pas, car, dans sa bonté, la nature l'avait muni d'une grande humilité et il acceptait la défaite facilement quand elle lui apparaissait évidente. Vrarg avait toutes les qualités pour devenir un bon chef mais il ne voulait pas de cette place et de toute façon, on ne voulait pas la lui confier. On le trouvait beaucoup trop réservé, trop discret, trop calme. Cela ne seyait pas à un orque d'être comme ça, on le lui reprochait toujours mais il ne voulait pas changer. Il avait son propre caractère et il y tenait. Celui-ci l'avait sorti de pas mal de mauvaises situations et lui avait permis d'en éviter encore plus. Au lieu de foncer tête baissée lorsqu'un obstacle se dressait sur son chemin comme tous les autres, Vrarg réfléchissait au meilleur moyen de le contourner. Mais cela ne voulait pas dire qu'il ne savait pas se battre, loin de là, et lorsque l'affrontement direct était inévitable, il ne rechignait pas à sortir sa hache ou son arc.

Comme la plupart des clans orques, ceux de Runak étaient nomades. Ils voyageaient selon leurs besoins. Ils choisissaient généralement des emplacements proche d'un cours d'eau et, si possible, à proximité d'une forêt. Le cours d'eau était indispensable, de manière assez évidente. Un accès direct à une source inépuisable d'eau potable était clairement un plus. Elle servait également pour la cuisine, pour la vaisselle, pour la lessive et pour le nettoyage. La présence de la forêt par contre était plus anecdotique. En réalité, elle facilitait la chasse et donc l'apport de nourriture. Les chasseurs pouvaient aussi se débrouiller sur d'autres terrains de chasse comme les grandes plaines ou les espaces plus désertique mais ils préféraient largement aller en région forestière. Les animaux y étaient plus nombreux, sur une zone beaucoup plus petite et étaient beaucoup moins combatifs que ceux des plaines qui eux, étaient soit très résistants, soit très rapides, ce qui ne rendait la tâche beaucoup plus difficile. La forêt assurait aux clans du gibier en abondance et leur permettaient donc de faire des réserves de nourriture conséquentes et plutôt rapidement. Les orques quittaient ensuite la région et déménageaient leurs campements quand ils jugeaient leurs réserves suffisantes ou lorsque les cibles se raréfiaient suffisamment pour rendre tout chasse plus assez fructueuse. Ils pliaient alors les tentes et partaient, tout simplement, ailleurs. C'est comme ça que fonctionnait le clan Runak.

C'est durant un de ces voyages que Vrarg devint une légende.

Tout se passait pourtant normalement. Ils étaient partis il y a quelques jours déjà et ils avaient encore assez de nourriture pour voyager. Ils ne savaient pas du tout où ils allaient par contre. Ils avaient quitté une zone agréable, tempérée, idéale même pour vivre. Mais, les traditions de leur clan étaient ainsi faites, et ils ne restaient jamais trop longtemps au même endroit, pour ne pas abuser de ce qu'offrait la nature et pour laisser le temps aux animaux et aux plantes de reprendre leurs droits et de réinvestir la zone. Respecter le cycle de la vie, c'est ça que disait les anciens et c'est ça que respectait toutes les nouvelles générations. Ils s'étaient donc lancé dans l'inconnu, selon cet ancien précepte. Le temps avait radicalement changé lors du voyage. La température avait chuté. Un vent glacial et cinglant s'était levé. Les orques, mais aussi les bêtes qui tiraient les chariots, commençaient à être frigorifiés et on commençait à sortir les vêtements plus épais, pour essayer de conserver le peu de chaleur qu'ils avaient encore. Très vite, le vent se renforça encore. De la neige se mit à tomber en même temps, transformant la mini-tempête en véritable blizzard. Dès lors, plus personne ne voyait clairement devant soi à plus de quelques mètres. Le chariot de tête avançait à l'aveuglette. Il était trop tard pour faire demi-tour, cette manœuvre demandait beaucoup de place et de la visibilité. Il n'était pas non plus question de s'arrêter et d'attendre, c'était encore plus dangereux. Ils n'avaient plus le choix, ils devaient avancer et espérer s'en sortir vivants. Mais même avec toute la prudence du monde, la mission semblait impossible. Le sol se recouvrait de neige rapidement et la progression devenait pénible pour les bêtes.

Au bout d'un moment, le convoi arriva dans une gorge. Deux hautes falaises de chaque côté, comme deux grands murs les emprisonnant, les contraignant à avancer tout droit. Et puis, il y avait toujours cet horrible blizzard, qui semblait se renforcer à chaque seconde. Le froid se faisait de plus en plus mordant. On faisait rentrer les orques les plus faibles, les enfants et les plus âgés, dans les chariots pour qu'ils puissent continuer le voyage tout de même. Cela alourdissait la charge que devait tirer les bêtes et les ralentissaient énormément mais ils ne pouvaient pas faire autrement. Ils ne pouvaient abandonner les plus faibles sur le bord de la route à une mort certaine, c'était inimaginable. À force de ralentir, ils finirent par être totalement arrêtés, bloqués par le mauvais temps. Les membres influents du clans s'étaient réunis pour discuter de la situation et des décisions à prendre dans l'immédiat. Vrarg n'avait pas été convié à cette petite réunion mais cela ne l'étonnait pas et ne le dérangeait pas. Il ne se considérait pas lui-même comme influent. Des ordres furent donnés à certaines personnes. Il fallait s'occuper des bêtes qu'elles ne meurent pas de froid, les recouvrir avec de chaudes couvertures et leur donne de quoi manger un peu. De même, il fallait distribuer la nourriture à tout le monde, et décider de rationner ou non. Vrarg n'eut rien à faire et resta à l'extérieur pour observer l'évolution du temps. Il ne s'améliorait pas, loin de là. En plus du blizzard, un orage éclata au dessus de leurs têtes. La situation devenait vraiment critique, elle n'arrêtait pas d'empirer.

Les gens commençaient à vraiment s'inquiéter. Une certaine panique s'installa lorsque la foudre commença à s'abattre pas très loin d'eux. Les enfants se mirent à pleurer et leurs parents avaient bien du mal à les réconforter. C'était le chaos total dans le convoi. Même le chef du clan Runak avait du mal à se faire entendre. Tout le monde avait un avis différent sur ce qu'il fallait faire et aucun ne voulait concéder du terrain à l'autre. Tout le monde était sur les nerfs, Vrarg y compris. La présence des deux falaises de plusieurs dizaines de mètres de haut de chaque côté ne le mettait pas en confiance. Et il avait raison de s'en méfier.

Avec la tempête, des tonnes et des tonnes de neige s'étaient accumulées sur le haut des falaises et menaçaient à chaque instant de tomber. C'est ce que Vrarg guettait. Et un éclair justement tomba pas loin. L'onde de choc produite par celui-ci déclencha la catastrophe. Une avalanche se forma. Un grondement sourd se fit entendre et le sol trembla. Tout le monde en chercha l'origine de prime abord puis, lorsque les premiers orques levèrent la tête, des cris fusèrent dans tous les sens. Tout le monde paniqua et se mit à courir mais sans vraiment savoir où ils allaient. Ils ne pouvaient fuir, ils étaient coincés. Dans cette confusion, personne ne vit réellement ce qui se passa ensuite mais la légende disait que le groupe entier dut sa survie à Vrarg.

Personne ne vit clairement ce qu'il se passa mais on raconte que Vrarg se dressa seul face à l'avalanche. Il sortit calmement sa hache. Cette hache n'avait en théorie rien de spécial, elle ressemblait à toutes les autres mais lorsqu'il la brandit aujourd'hui, face à ce danger qui menaçait tout le clan, une étrange lueur s'en dégagea, rougeoyante, comme si elle s'était enflammée. Certains racontèrent que c'est sa volonté de sauver tout son clan qui lui donna ce pouvoir, d'autres dirent que c'était le fruit d'un entraînement secret sur plusieurs années qui lui avait permis d'acquérir ce pouvoir. Personne ne sut d'où lui venait ce pouvoir mais personne ne s'en préoccupa sur le coup. Vrarg mit un coup d'estoc dans le vide, comme à un ennemi invisible. Rien ne se passa sur le moment, mais après quelques secondes, un autre grondement encore plus puissant se fit entendre. Une des deux falaises se mit à bouger et elles semblèrent se rapprocher l'une de l'autre. La puissance de son coup de hache avait littéralement coupé un morceau de la falaise et elle s'affaissait maintenant contre sa voisine d'en face. De la neige et des morceaux de roche tombaient sur le convoi mais au final, lorsque tout se stabilisa à nouveau, c'est comme s'il y avait un toit artificiel au dessus de leurs têtes. L'avalanche était neutralisée. Les gens mirent un peu de temps pour s'en rendre compte mais lorsqu'enfin, les gens se calmèrent et levèrent la tête, ils virent et tous furent soulagés. Ceux qui avaient vu la scène n'en croyaient pas leurs yeux. Vrarg, l'orque réservé du clan venait de leur sauver la vie par un geste héroïque.

Finalement, tout le convoi passa la nuit sous cet abri artificiel, et la tempête s'arrêta le lendemain, si bien qu'ils purent repartir et trouver un endroit hospitalier quelques jours plus tard.

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La légende ne précise pas ce qu'il est advenu de Vrarg au sein du clan mais une fin est souvent rajoutée et la version la plus couramment racontée est que le clan tout entier lui proposa le rôle bien mérité de chef mais qu'il le refusa et qu'il continua de vivre comme il l'avait fait le reste du temps. On transmet encore cette légende de nos jours pour enseigner aux enfants ou rappeler aux adultes qu'il ne faut pas sous estimer les capacités des autres et que la modestie et l’humilité sont des valeurs respectées et respectables même si peu répandues chez les orques.

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