Sanna s'était longuement préparée avec ses sœurs. C'était un grand jour, un jour très particuliers pour tous les habitants ; une cérémonie allait avoir lieue au mémorial des anciens dans le Grand Palais d'Adiryl ; et la famille des Rán ne raterait jamais un tel événement et Snow pourrait ainsi montrer à tous quelle bonne matriarche elle faisait pour la lignée.

Mais Sanna, elle se moquait un peu de toutes ces démonstrations protocolaires, elle voulait s'y rendre par curiosité et surtout pour visiter le monument. Elle était bien allée roder par là bas plusieurs fois mais elle savait que c'était interdit et elle avait toujours fini par faire demi-tour. Snow lui avait demandé de rester à proximité et de surtout ne pas attirer l'attention et de ne pas faire de « miracles ».

Pourquoi elle me traite toujours comme ci j'étais encore une gamine !?

Sanna avait donc été forcée de mettre une de ses plus belles robes en dentelle noire ce qui n'était pas forcément à son goût car elle comptait bien parcourir les couloirs et ce n'était pas une tenue de prédilection pour la liberté de mouvement, enfin, elle avait quand même réussi à négocier le choix de ses chaussures : ses bottes de combats préférées. Par habitude, il y avait rangé un kunaï dans chaque. Elle se leva et se dirigea vers la sortie en compagnie de ses sœurs.

Sanna trouva le chemin pour arriver au Grand Palais très long. Ses sœurs parlaient de choses et d'autres mais n'avançaient pas bien vite. Sanna ramassa deux cailloux et s'amusa à les lancer en l'air pour passer le temps. Au bout d'un moment qui lui parut interminable, elles arrivèrent enfin devant le grand édifice. Il était toujours si impressionnant.

Et si austère …

Elles traversèrent le long et interminable pont pour franchir la première enceinte du palais puis se dirigèrent vers le mémorial des anciens qui devait être ouvert pour l'occasion. Il commençait à y avoir de plus en plus de monde. Sanna fit un signe à ses sœurs, il était hors de question qu'elle suive l’événement de loin, elle avait l'habitude de se faufiler dans les foules et sema ses sœurs rapidement au grand désespoir de Snow.

Enfin tranquille.

Le lieu était très grand et sûrement très très ancien mais toujours aussi austère composé de pierres et de statues. Combien d'anges avaient eu l'honneur d'être inhumés ici ? Cet endroit regorgeait sûrement de curiosités et de nombreuses salles. Pour une personne n'ayant aucun sens de l'orientation, ce lieu pouvait sûrement devenir un vrai labyrinthe. Elle étudia rapidement les lieux et estima au vu du mouvement de foule où allait se situer les événements du jour.

Si seulement je pouvais prendre un peu de hauteur.

Sanna leva les yeux et étudia les différents endroits qui lui permettrait d'être aux premières loges mais surtout sans se faire repérer car sa sœur serait capable de la priver de nourriture pendant une journée si elle apprenait qu'elle avait osé escalader les vestiges de leur civilisation.
Elle repéra un mur un peu plus ancien et légèrement érodé qui lui permettait d'avoir des prises assez faciles mais elle serait un peu plus loin du centre de l'action mais d'un autre côté elle aurait une vue plongeante dessus surtout si elle arrivait à se glisser sur le rebord de cette colonne.

Tu peux y arriver

Sanna, agile et silencieuse comme un chat, arriva à l'emplacement qu'elle jugea idéal et attendit en silence. Un frisson la parcourut car la foule semblait émue et triste, et peut être même impressionnée par autant de splendeurs.

Une personne se détacha de la foule, il portait une manteau rouge-carmin et se mit à parler d'une voix claire et forte. Rien d'autres ne rompit le silence et Sanna était sûre que toutes les personnes présentent entendirent distinctement sa voix et par réflexe elle retint également sa respiration.

« - En ce jour de gloire et de tristesse. Nous sommes privilégiés de respirer et de goûter l’air pur de l’Empire. Inspirez profondément, mes frères et sœurs. Sentez-vous dans vos poumons les derniers souffles de ceux qui nous quittent pour entamer leurs derniers voyages, celui dont ils ne reviendront jamais. »

Il y avait de nombreux corps, trop nombreux même. Certains étaient recouvert d'un linceul blanc avec les armoiries de l'Empire, d'autres des bleus mais Sanna fixa son regard sur linceul unique, enfin pas si unique que ça, de la couleur du manteau de l'oracle. Cette couleur était si belle.

Je me demande ce qu'ils sont … ces oracles … j'aurais mieux du écouter les leçons sur notre propre monde plutôt que de cultiver ma curiosité pour le monde du milieu.

Les personnes présentent entamèrent un chant si profond et si triste que Sanna s'essuya une larme qui roulait sur sa joue. Il fallait qu'elle en sache plus, elle avait besoin de savoir, elle avait besoin de comprendre et elle était décidée à suivre le cortège aussi longtemps que possible.
Elle redescendit légèrement et les suivit dans l'ombre de la foule, puis elle se stoppa devant une immense statue. Sanna en eut le souffle coupé. Elle s'était essayé quand elle cherchait encore sa voix aux métiers d'art et de sculpture mais elle n'avait pas eu assez de patience pour aller au bout et chaque échec la mettait en colère.

Elle contempla quelques instants la statue en silence.

Adyroth, père et Empereur des anges

Est-il fier de son peuple ? De ce monde ? Sanna se posa de nombreuses questions et se demandait comment il avait vécu, quel était ces projets, ces convictions... Elle se promena dans les catacombes regardant les statues et les œuvres qui étaient toujours plus belles les unes que les autres. Elle avait repéré où s'était dirigé l'oracle au manteau rouge et elle comptait bien le rattraper un moment ou à un autre pour l'observer et comprendre quel était le but de cette classe et quel rôle il y jouait. Elle aimait observer et comprendre, c'est pour cela qu'elle faisait partie des soldats qu'on envoyait en reconnaissance sur Feleth. Le seul problème c'est que son imagination lui jouait souvent des tours et qu'elle avait énormément de mal à rester inactive devant ce qu'elle considérait comme injustice. Elle continua de flâner un moment puis elle remarqua que la foule se faisait de plus en plus clairsemée et que la plupart des personnes étaient reparties à leur vie quotidienne.

Sanna aperçut des mouvements et elle savait très bien que d'autres intimaient l'ordre de quitter les lieux mais se cacher et se fondre dans l'ombre était une de ces particularités et pour une fois, c'était un domaine dans lequel elle excellait. Elle se faufila et se cacha dans l'ombre de certaines sculptures parfois elle grimpa même sur certaines pour mieux se cacher. Elle avança un peu plus loin dans les catacombes et elle tomba à nouveau sur ces porteurs de manteaux rouges. Elle était dans la bonne direction.

Elle vit une porte qui venait d'être repoussée, et sans trop savoir pourquoi son instinct lui disait que c'était là qu'elle devait aller. Elle s'avança prudemment en faisant bien attention de ne faire aucun bruit car le moindre bruit attirerait l'attention des sentinelles et résonnerait dans tous les couloirs.

Comme le gargouillis d'un ventre affamé

Sanna avança prudemment, se stoppant au moindre doute, restant figée plusieurs minutes avant d'être certaine de pouvoir avancer.

Elle n'était plus qu'à quelques mètres de la porte.

Encore un petit effort

Sanna avait l'impression que cette porte l'appelait, un peu comme une boîte dont on n'ignore le contenu. On a qu'une envie c'est de l'ouvrir. Sanna descendit délicatement entre un pilier et le mur et alors qu'elle allait sauter à terre, elle sentit quelque chose glisser de sa poche. D'un coup, elle comprit, par réflexe, elle avait gardé les deux cailloux dans sa poche et l'un d'entre eux était en train de tomber. Elle essaya en vain de le rattraper mais celui-ci tomba sur le sol et le bruit ricocha contre tous les murs et se répercuta tout le long des catacombes. Sanna sauta au sol et ramassa son caillou, il n'y avait plus de temps pour la discrétion, elle courra droit vers la porte, le bruit de ses talons résonnant fortement. Elle poussa la porte, se glissa à l'intérieur et la referma rapidement puis s'appuya le dos dessus et poussa un profond soupir.

Et bien je ne suis pas dans la mouise...

Sanna entendit comme un frottement de tissus et leva les yeux. Elle pensait que la salle serait déserte mais elle se trompait.