Le corbeau et le moineau (pv Haocia Nerini)

Gamin des rues ________________ ________________

Cela faisait plus d'une heure que Jim flânait parmi les ruelles étroites de Madorass. On pouvait rêver mieux comme lieu de promenade mais l'enfant n'y prêtait pas garde. Il rêvassait sans faire attention à ce qui l'entourait, sauf lorsqu'un détail amusant ranimait à nouveau tous ses sens. Un éclat étrange animait alors ses iris tandis qu’il suivait des yeux la bizarrerie.

Il était en fait arrivé dans la capitale il y a plusieurs jours, environ trois semaines mêmes, mais il n’avait d’abord pas osé emprunter les rues labyrinthiques que contenait la ville. Mais la curiosité, surtout alliée à la crainte, était un véritable fléau pour lui : il n’y résistait presque jamais. Il avait craqué dès le troisième jour. Au début anxieux, il s’était aperçu qu’il retrouvait bien son chemin, malgré le peu de lumière qui l’éclairait. Quand il en manquait, vers le crépuscule, il faisait apparaitre une petite boule de feu au creux de sa main, dont il pouvait régler la luminosité avec la longueur des flammes. Il tâchait néanmoins de se montrer discret, car l’ancien lui avait expliqué que la magie entre certaines mains pouvaient provoquer des réactions étranges chez les gens, et que vois un gamin manipuler le feu était plutôt étonnant.

Il avait beaucoup progressé ces derniers temps. Il s’était aussi beaucoup entraîné, et il parvenait désormais à créer de plus grandes flammes, plus dangereuses, mais aussi des formes flamboyantes plus jolies et plus variées. Quand il s’ennuyait et en avait marre de bricoler ses jouets, il faisait voler de petits oiseaux incandescents devant ses yeux, tentant de les rendre le plus réalistes possibles.
Il commençait d’ailleurs à avoir mal aux jambes, il s’assit donc contre un bâtiment et commença à modeler une petite flamme suspendue entre ses mains.

Il essayait de faire un bateau. Il avait pu en voir au bord de l’océan il n’y a pas longtemps, océan qu’il contemplait pour la première fois. Il ne savait plus très bien à quoi ressemblait un bateau…
Il y avait une coque et des mâts mais il ne savait pas comment agencer tout cela. Il commença à marmonner son agacement, jusqu’à parler tout seul à voix haute. Le silence qui lui répondit lui en fit prendre conscience et il s’interrompit. Il eut un dernier agacé pour sa piteuse barque, puis, dans un soudain élan de frustration, il fit éclater le navire en mille flammèches qui s’évaporèrent dans l’air.

Il releva la tête d’un coup. Il avait l’impression qu’on l’observait, mais aucune des personnes présentes, malgré leur bizarrerie éventuelle, ne semblait faire attention à lui. Il décida tout de même de s’éloigner. Sautant sur ses deux jambes, il repartit d’où il venait en sifflotant. Son ventre gargouilla légèrement. Le remarquant, il extirpa une pomme verte de son sac trop rempli et croqua dedans joyeusement. Il avait totalement oublié sa désagréable impression et le lieu où il se trouvait. Il regarda sa pomme entamée d’un air triste.

- Tu ne fais pas voler toi. Pourtant t’es verte.

Depuis qu’il avait rêvé que les pommes vertes conféraient à quiconque les mangeait le pouvoir de voler, il avait décidé d’en manger le plus possible au cas où il en trouverait une magique…

Le Corbeau ________________ ________________

Haocia se déplaçait la plupart du temps la nuit. Car les gens les plus peureux n'encombraient pas les rues, et elle pouvait facilement se dissimuler dans l'obscurité, avec sa longue cape sombre et son chapeau noir. Elle revenait d'un rendez-vous important avec un espion, pour lui donner les informations qu'elle avait récolté sur les prisonniers qu'elle avait torturé. La discrétion était de mise, car il y avait toujours ces rats répugnants qui rampaient et grouillaient dans les rues. C'était un véritable fléau. Elle marchait donc, passant par les ruelles les plus étroites et les plus sombres, celles que les gens « normaux » n'oseraient pas emprunter une seule fois dans leur vie. Mais elle n'était pas quelqu'un de normal, elle était la tortionnaire du Palais Royal, ce n'était pas rien. Elle avait fini par se faire connaître dans toute la capitale, et surtout, de tous les rebelles, par son masque singulier et ses pouvoirs atroces. On la surnommait d'ailleurs « Le Corbeau ». Un surnom plus ou moins flatteur pour la sorcière. Ceux qui la croisaient, savaient en général de quoi elle était capable, et il la craignait. Même les soldats du Roi avaient peur d'elle. En fait, il n'y avait qu'une partie des Capes Blanches qui l'appréciaient, car ils étaient tous aussi horribles et cruels qu'elle. Ainsi, la plupart du temps, elle était confrontée à sa solitude, et sa solitude lui faisait ruminer sa haine et sa rancune. Et sa haine et sa rancune la rendait encore plus solitaire.

Alors qu'elle marchait en pensant au prisonnier qu'elle avait achevé dans la journée, elle s'arrêta net en voyant une lumière faible venant de la ruelle adjacente. Elle glissa sa main dans sa cape, attrapant une fiole de vitriol, et s'avança lentement vers la source de la lumière, qui était sur le chemin qu'elle devait prendre. Elle se colla au mur, et pencha légèrement la tête, sans se faire remarquer, pour observer ce qui se tramait. Elle fut alors surprise de découvrir un enfant. Ce n'était pas le fait de voir un enfant qui était surprenant, c'était le fait de voir un enfant tout seul, tard la nuit, et dans une ruelle aussi malfamée. Mieux encore, cette lumière qui jaillissait tantôt était tout bonnement du feu qu'il avait formé avec sa magie. Elle continuait de l'observer ainsi, avec un petit sourire intéressé et amusé. Il maniait le feu à la perfection. Rares étaient ceux qui commençaient la magie dès qu'ils étaient enfants. Haocia appelait ce genre d'individu, « l'élite des mages ». Évidemment, elle faisait partie de cette élite. Il semblait agacé de ne pas arriver à donner la forme qu'il voulait aux flammes. Elle entendit ensuite quelques marmonnements, et en un geste les flammes disparurent dans un petit crépitement explosif.

Il avait vraiment du potentiel. En pleine nuit, elle avait réussi à trouver la petite lumière d'un diamant brut. Elle continuait de le fixer, tapie dans l'ombre, pour tenter de cerner un peu cet enfant avant de se lancer à sa rencontre. Elle avait un inconvénient et un avantage à cette rencontre : elle trouvait toujours qu'un enfant était énervant. Il courait partout, posait des questions sans intérêts, et il en valait de même pour ce qu'il disait. Leur naïveté et leur insouciante la dégoûtaient aussi. Néanmoins, les enfants étaient relativement influençables, et leur naïveté pouvait être utilisée pour faire d'eux des personnes intelligentes et féroces...contre la lutte des rebelles. Mais le temps des projets n'étaient pas encore venus. C'était souvent un défaut que la sorcière avait. Elle se projetait parfois trop dans l'avenir, alors qu'elle savait très bien qu'il fallait s'intéresser aux moyens d'atteindre le but, et non au but en lui-même.

Il glissa sa petite main dans son sac où il secoua tous les objets dans un vacarme de désordre. Puis, une fois qu'il eut saisi sa proie, il remonta le bras pour en sortir enfin une pomme verte. C'était comme les aimait Haocia. Vive et acide. Il y mit ses dents goulûment, puis son énergie se transforma en nonchalance. Il fit une petite moue en disant quelques mots qui raisonnèrent dans toute la petite ruelle. La sorcière haussa un sourcil, ne comprenant pas ce qu'il voulait dire par là. Peut-être avait-il des problèmes d'éloquence. Puis elle détacha pendant un instant son attention. Elle observait lentement les alentours, pour s'assurer que personne ne l'avait suivie, ou bien même espionnée par une fenêtre. De toute façon, elle avait toujours sa fiole de vitriol pour se défendre, et elle n'hésiterait pas une seconde à défigurer le premier malotru qui voudrait faire le malin avec elle. Ainsi, elle fit un pas silencieux pour faire face à la ruelle et mieux voir l'enfant. Tandis qu'il allait recroquer dans sa pomme, la sorcière tendit son bras vers lui, et ouvrit en grand sa paume. La pomme s'arracha des petits doigts de l'enfant, et vola jusqu'à la main ouverte de la jeune femme.

Il tourna la tête, et elle eut l'impression qu'il était tétanisé. Elle ne pouvait pas le lui reprocher, après tout, elle avait un masque imposant, voire même terrifiant pour un enfant de son âge. Elle s'approcha de lui, faisant claquer lentement ses talons contre le pavé de la ruelle, et arriva face à l'enfant. Elle baissa la tête, et s'accroupit pour se mettre à sa hauteur et le rassurer. Ses deux yeux bleus se découvraient alors à l'enfant, et une main fine lui tendit alors sa pomme verte. Ses yeux se plissèrent sous son masque, laissant deviner un sourire qui lui était adressé. En accompagna son geste, elle fit :

Moi, je peux la faire voler.

Gamin des rues ________________ ________________

Jim sursauta en voyant apparaître quelqu'un devant lui. La silhouette était plutôt impressionnante … Entièrement vêtue de noir, on aurait pu croire à un spectre ou quelque chose du genre. La forme de son visage lui glaça d'abord le sang avant de comprendre que ce n'était qu'un masque. Il avait conscience de rester pétrifié sur place, aussi, pour retrouver une contenance, il porta par réflexe la pomme à sa bouche. Mais celle-ci ne l'atteignit pas... Il sentit quelque chose se serrer dans son ventre en la voyant s'envoler. C'était un léger pincement, du type de ceux qu'on peut ressentir quand un mélange de crainte et d'excitation nous emplit.

Il suivit des yeux le fruit, jusqu'à le voir atterrir dans la paume de l'inconnu(e). Il n'avait plus rien pour le décider à faire un mouvement. Il resta là à fixer son interlocuteur toujours silencieux. Il n'avait pas peur. Enfin si, mais ce n'était pas une peur rationnelle. Il n'avait pas peur de mourir, pas non plus d'être volé, battu ou quoique ce soit. Il avait peur comme dans un cauchemar : sans savoir pourquoi. La situation n'était pas non plus des plus banales... Si encore il s'agissait d'une Cape Blanche, ou d'un mage au visage humain, mais justement, rien n'indiquait que l'individu soit humain, rien n'ancrait sa vision dans le réel. Il parvint à contenir un frisson à l'idée qu'il était peut-être tombé dans un de ces endroits où l'on rêve éveillé... Le sage lui en avait parlé une fois, distraitement. Il aurait voulu disparaître tandis qu’on s’approchait de lui, mais étrangement, il se sentit plus calme une fois qu’il fut en face de l’inconnu.

Ses yeux souriaient, c’était rassurant. Quelqu’un qui voudrait se débarrasser de lui n’agirait pas de la sorte, il en était sûr, malgré son peu d’expérience. La voix était plutôt féminine, mais il n’en aurait pas juré, et de toutes façons il s’en moquait, c’était une ombre, c’est ce qui importait.

« Et vous… Vous savez voler, vous ? »

Il avait hésité, ne sachant pas s’il avait le droit de poser une question à un tel être. Il n’avait à présent plus aucune angoisse, il était intimidé, mais il ne ressentait plus le besoin inexpliqué de prendre ses jambes à son coup. Il regardait le masque sous un autre angle. C’était un masque d’oiseau. Il ne savait pas exactement lequel, mais tout de même un oiseau. Cela rendait la personne en dessous tout de suite bien plus sympathique. Alors qu’il ouvrait la bouche pour demander précisément l’espèce représentée, un bruit de pas de fit entendre, venant de derrière lui. Il se crispa. A cette heure on croisait soit des Capes Blanches, soit des brigands, et il n’appréciait ni les uns, ni les autres.
Il n’osa d’abord pas se retourner, cela signifierait qu’il se souciait de ceux qu’ils pouvaient croiser, et donc qu’il était potentiellement louche. Il avait vite appris à louvoyer entre les mailles du filet.

Ses grands yeux rougeâtres se posèrent sur la personne au masque. Elle avait un air suspect. Il espérait pour elle qu’il serait le seul à le penser, quoique qu’elle saurait probablement bien mieux se défendre que lui si elle avait à se battre.
Les pas se rapprochèrent, sans même le remarquer il se mit à respirer plus vite. Il gardait pourtant un air impassible, il ne voulait pas montrer son inquiétude. Finalement, un groupe de deux Capes Blanches arriva à sa hauteur. Visiblement elles ne lui voulaient rien de spécial. Ses poumons reprirent un rythme normal.

Il s’aperçut alors qu’il fixait le sol et avait détourné les yeux de l’inconnu(e). Il voulait murmurer quelque chose pour s’en excuser, ou juste revenir à la parole, mais la présence des deux Capes Blanches l’en empêchait, et il gardait sa langue collée à son palais, muet comme une tombe.

Le Corbeau ________________ ________________

Elle avait réussi à le détendre un peu. Avec naïveté, il lui demanda si elle savait voler. Elle fut légèrement surprise, car elle n'avait pas l'habitude qu'on lui pose une telle question. Car pour elle, c'était vrai, et qu'on la mette face au secret qu'elle n'avait jamais divulgué, cela lui faisait tout drôle. Elle trouvait étrange que l'on puisse ainsi dire des mots si anodins, qui en fait touchaient directement une personne. Les grands yeux de l'enfant la regardait avec insistance, il attendait sa réponse. Après un instant de réflexion, elle acquiesça la tête en disant :

Bien sûr que je sais voler, c'est un don que j'ai depuis la naissance.

Elle sourit sous son masque. Il était inhabituel qu'elle dévoile un tel secret aussi vite. Mais après tout, la crédibilité d'un enfant était toujours remis en cause. Personne ne croyait les enfants, surtout un gamin comme celui-ci qui avait une bonne dose de naïveté. Elle ne risquait rien, et puis cela lui permettrait d'avoir un peu plus sa confiance. Tout s'emboîtait harmonieusement et parfaitement. Alors qu'elle s'apprêtait à lui demander son nom, elle entendit des bruits de pas. Elle se redresse brusquement et rapidement, car Haocia était toujours méfiante. La guerre civile qui faisait rage ne lui permettait pas de baisser sa garde, et elle n'écartait pas la possibilité que cet enfant ne soit en fait, qu'un appât. Elle avait mis un rebelle au pilori pendant cinq jours d'affilés, elle s'attendait à des représailles.

La sorcière fut soulagée de voir deux silhouettes blanches qui se détachaient de l'obscurité. Les deux hommes s’avancèrent vers elle, et la saluèrent humblement par une révérence. Elle ne savait pas si c'était du respect ou de la crainte, mais peu importe. Elle ne les quittait pas des yeux. Elle était froide, mais les Capes Blanches y étaient habituées, car c'était dans sa personnalité. Au fond, elle les aimait bien, et elle pensait que c'était réciproque : ils avaient tout de même beaucoup de carnages en commun. L'un deux pointa le gamin du menton et fit :

« Ce gamin vous importune, Dame ?

-Non, il est avec moi. »

Sa voix retentissait et imposait. Les deux Capes Blanches ne s'attardèrent pas plus longtemps suite à sa réponse , et s'éloignèrent dans d'autres ruelles pour continuer leur patrouille...ou bien leur traque ? Une fois qu'on entendait plus le bruit de leur pas, le bec de corbeau se dirigea vers l'enfant. Les Capes Blanches lui rappelèrent une unième fois que ces ruelles n'étaient pas sûres. D'un autre côté, elle était surtout intéressée par ce petit garçon. D'où venait-il, où étaient-ces parents, était-il simplement un orphelin ? Sûrement, sinon il ne serait pas à errer dans les rues à manger une pomme et à lui parler. Mais il lui fallait tout de même vérifier, c'est pourquoi elle lui demanda :

Tu sais, cet endroit n'est pas sûr du tout. Dis moi où tu habites, et je t'y accompagnerai. Et si tu es sage, je te montrerai comment je sais voler.

La bienveillance de Haocia n'était ici qu'un faux semblant. Ou bien était-ce un faux semblant de faux semblant ? Elle se persuadait que non. Elle ne cherchait qu'à l'amadouer pour ses projets. Un tel pouvoir ne pouvait pas être négligé, et les mages manquaient à la cour du Roi. Elle se sentirait moins seule, mais ça ce n'était qu'un infime détail qui la poussait à s'intéresser à cet enfant. Néanmoins, si le gamin lui avait demandé comment elle avait fait pour avoir ce pouvoir, elle-même n'aurait pas su répondre. Il y avait des éléments magiques qui ne s'expliquaient jamais. Elle savait déjà qu'elle répondrait qu'elle était simplement chanceuse d'avoir hérité de ces pouvoirs. Mais tout au fond d'elle, la sorcière se posait aussi ce genre de question, et il lui arrivait de faire des recherches pour en savoir plus sur la source de ce magnifique sortilège.

Elle baissa les yeux sur l'enfant qui fit la moue. Elle s'attendait déjà à sa réponse, mais elle attendit qu'il le lui dise de haute voix. Tout s'enchaînerait comme elle l'avait décidé. Cela avait toujours marché comme ça/

Gamin des rues ________________ ________________

Jim n’avait pu empêcher ses yeux de s’écarquiller à la mention du pouvoir de voler. Il aurait voulu montrer un peu plus de retenue (il ne voulait en réalité pas montrer qu’il était si impressionné par cette magie pour ne pas être méprisé par la suite), mais cela lui était totalement impossible. Cependant, la présence des Capes Blanches le glaçait, il était donc dans un état mi-ébahi, mi-angoissé, et ses capacités de réflexion en pâtissaient. Son ahurissement atteignit son paroxysme quand il comprit que les Capes Blanches connaissaient visiblement l’individu masqué. Il revint sur ses gardes un instant, et puis après tout ? Il avait toujours entendu dire du mal de ces « gardes » mais cela ne signifiait pas qu’ils étaient tous mauvais non ? D’ailleurs ils ne pouvaient pas être tous aussi mauvais qu’on le disait, du moins le croyait-il. En effet, ces derniers temps, il avait estimé que puisque chacun avait une part de mal en lui, il devait y avoir aussi une part de bien, et vice versa, sans quoi personne ne pourrait survivre, trop déséquilibré par un des bords. Il ne connaissait bien entendu ni l’existence des démons, ni des anges.

Il commençait à se faire tard, et la fatigue se faisait ressentir dans ses jambes. Jim évitait de le montrer, mais il aurait volontiers dormi quelque part au chaud, d’autant que le froid était tombé avec la nuit et que sa veste trouée ne remplissait plus vraiment ses devoirs. Il fut légèrement surpris de voir l’inconnu(e) aborder justement ce sujet. Il fut gêné. Il ne savait pas quoi répondre. Le campement de son clan était sans doute à plusieurs heures de marche et il n’y avait pas mis les pieds depuis plus de deux semaines déjà. Il savait que son absence n’inquièterait personne, au contraire.

Il balbutia vaguement quelques mots, indiquant que ce n’était pas la peine, puis il se sentit stupide de mentir. Qu’avait-il à perdre ? Si on lui voulait du mal, qu’il ait une maison ou non n’y changerait rien.

« En fait…Il n’y a pas vraiment de lieu où j’habite, donc… euh… je peux rester là ? »

Il avait haussé l’intonation la fin de sa phrase, comme s’il demandait une permission. Il sentit soudain qu’il n’était pas loin de claquer des dents et se mordit les joues pour le cacher. Il poursuivit, espérant créer une maigre diversion et changer de sujet.

« Mon nom, c’est Jim, je … Je peux vous poser une question ? »

Il aimait bien son prénom, étrangement, il le donnait donc très rapidement à tous les gens qu'il rencontrait. quant à la question, elle était plus ou moins rhétorique, il comptait la poser quoiqu’il arrive. Aussi, sans attendre la réponse, il reprit la parole, les yeux brillant à nouveau de l’éclat d’intérêt qu’il avait arboré au départ.

« Vous êtes quel oiseau ? »

Aïe. Ce n’était pas ce qu’il avait voulu dire, il parlait de la forme du masque, mais trop tard, après tout, on comprendrait bien sa question, même si elle était plutôt mal posée. Il aurait juré avoir vu un faible scintillement dans les yeux du masque, mais il devait encore se tromper. Il aurait aussi voulu demander comment il pouvait appeler cette mystérieuse personne, comment elle faisait pour voler, si elle savait faire d’autres choses, … Et soudain, un flot de questions envahit son esprit, il débordait littéralement de curiosité, quelque chose lui disait qu’il pourrait trouver ici les réponses à de nombreuses interrogations…
Comme le froid persistait, il chauffa discrètement les paumes de ses mains sans y faire apparaître une flamme, et se les passa doucement sur les bras. Cela lui fit du bien, de penser qu’il était capable parfois d’être complètement indépendant sur des sujets aussi importants…

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HRP : Désolé, j'ai mis du temps et c'est pas un poste extraordinaire, je ferai mieux la prochaine fois.

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