Tu dois tuer! [PV Haocia Nerini]

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La nuit était froide, l'ambiance était lugubre. Ça ne m'atteignait pas outre mesure, je n'en avais rien à faire en fait. Et non, je ne m'y sentais pas à l'aise non plus, je n'éprouvais pas ce genre de sentiments. L'orgueil est un sentiment qui me parle et que je ressens.

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Deux semaines auparavant, des capes blanches étaient arrivées dans ma loge. La ou j'habitais avec 4 autres soldats depuis mes seize ans, âge correspondant à mon enrôlement dans l'armée. Je ne les connaissais pas outre mesure, j'avais parler avec eux lorsque la nécessité s'était fait ressentir, le jugeant comme des gens sans honneur, trop portés sur la boisson et les bas instincts. Ils avaient aussi trop souvent essayé de gonfler leurs égos par des actes de cruauté gratuits, sans qu'aucun ordre ne soit émis auparavant. J'avais tué des gens durant mon service, parfois des femmes, parfois des enfants, sans en éprouvé une once de remords. Mais je n'en avais jamais fait une fierté comme le jour ou celui du nom de Goran était entré dans le dortoir avec la tête d'un nourrisson dans les mains. Je ne l'avais pas sanctionné ou quoi que ce soit, je désapprouvais juste ce qu'il faisait. L'affronter n'en valait pas la peine, tant il m'était inférieur...

Ces capes blanches me demandèrent de les suivre, ce que je fis sans aucune appréhension. A y réfléchir ça aurait pu être pour me punir du meurtre de leur confrère qui avait eu lieu quelque jours plus tôt dans une auberge, mais sur le moment, je n'y pensai même pas. Je ne fis que suivre les ordres, comme j'y avais été habitué pendant des années.

Ils me firent entrer dans une pièce ou d'autres capes blanches m'attendaient. Parmi celles-ci se trouvaient les soldats qui m'avaient vus tuer leurs confrères. Je pris place sur la chaise qu'ils m'indiquèrent en attendant qu'ils me disent les raisons pour lesquelles ils m'avaient convoqué. Ce fut le plus vieux d'entre eux qui pris la parole.

"Nous vous avons vu tuer un des nôtres il y a de cela trois jours dans une des tavernes de la ville..."

Son regard était intense, comme s'il voulait me faire ressentir quelque chose, je ne voulais pas lui dire que c'était peine perdue.

"Même si ce frère était un membre apprécié dans la confrérie, nous avons surtout retenus vos qualités au combat qui vous ont permis de disposer de lui assez facilement."

Comme je l'avais pensé quelques jours plus tôt, ces humains là, puisqu'ils l'étaient en majorité, ne s'encombrait pas de sentiments.

"C'est pourquoi, après une réunion entre nous nous avons décidé de vous proposer un poste parmi nous."

Un sourire, voilà tout ce qui exprima ma fierté. Un sourire en coin, presque cynique. Toutefois, c'était peut-être un des moments le plus rempli d'émotion de mon existence. Là, je pouvais être fier! Là, je sentais que je deviendrai utile! Là, ils apprendraient à me craindre! Je répondis, d'une voix gutturale, enrouée par le manque de pratique:

"J'accepte"

L'idée d'enfin m'approcher d'assez près de Kaull Hendenmark me remplissait de fierté et d'orgueil, et même si ca ne se voyait pas, j'éprouvais une émotion intense à l'idée de pouvoir enfin faire mes preuves. Une flamme ardente s'était éveillée en moi, et telle un feu grégeois elle ne menaçait pas de s'éteindre de si tôt.

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Depuis, je n'avais pas reçu de mission particulière, à part des patrouilles que j'effectuais essentiellement seul. Je n'y vis aucun inconvénient, puisque il n'y avait la aucun moyen de montrer mes qualités. Mes journées avaient été essentiellement consacrées à mon entrainement. Mes adversaires étaient meilleurs, mais je n'avais pas encore rencontré mon égal. Mes supérieurs m'avaient mis en garde, je ne pouvais pas tuer d'autres manteaux blancs, aussi ne poussais je jamais l'affrontement trop loin.

Cette nuit était froide, lugubre et j'attendais quelqu'un. Celui-ci devait venir avec des ordres de mission qui je l’espérais permettrait de prouver mes valeurs.

Le Corbeau ________________ ________________

Un groupe de corbeaux aussi sombre que l'obscurité s'envola quand une figure effrayante s'avança d'un pas déterminé, une torche à la main. La figure s'arrêta un instant pour regarder derrière elle, et observer ces oiseaux majestueusement sinistres s'éloigner. Elle esquissa un léger sourire sous son masque, et reprit sa marche. Ses pas raisonnaient dans les petites ruelles étroites, vides et sordides.
Bien qu'elle s'avançait, son esprit s'éloignait et se perdait dans les méandres de ses intimes pensées. Elle repensait à ce rebelle qu'elle avait fait mettre au pilori, et à la réputation qu'elle s'était forgée de part cet événement. Plus jamais elle ne serait discrète ou ignorée, car tout le monde savait maintenant que c'était cette personne, ce visage de corbeau, qui était puissant, cruel, et loyal. C'était la tortionnaire du Roi. Beaucoup de gens remettaient en question son identité de femme. Comment une femme peut-elle faire autant de massacres sanglants ? Se demandaient-ils. Une dose de folie occulte, et de rationalité inébranlable, et voilà ce que vous obteniez, une mage en proie à des plaisirs sordides.

Quand les Capes Blanches lui demandèrent aimablement, car ils étaient ses plus fidèles alliés, de participer avec eux dans une descente à Madorass pour exterminer un foyer de rats, cette vermine de Rébellion, elle n'hésita pas une seconde à accepter. En réalité, elle avait besoin de renforcer sa cruauté et sa haine, pour étouffer son humanité qui avait explosé lors d'un combat avec un seïrdan. Un moment qu'elle voulait oublié. Elle voulait avoir sa revanche sur elle-même, un massacre à l'élégie du Corbeau, ce qu'elle voulait être. Ces jours-ci, elle se dégoûtait encore plus d'elle-même. Elle se sentait plus sensible, plus fragile, plus irritée, en somme, plus humaine. Faire ce carnage serait alors une sorte d'épreuve pour retrouver son impassibilité, son aigreur. Elle avait passé tant d'années à devenir indifférente et insensible, et tout avait volé en éclat à cause de ce stupide démon.

Elle aperçut enfin une petite tâche blanche qui se détachait de la nuit. Plus elle s'en rapprochait, plus les Capes Blanches se distinguaient. Elle arriva enfin face au groupe, et regarda chacun d'eux. Un homme attira plus l'attention de al sorcière. C'était un nouveau visage parmi ses alliés. Elle n'aimait pas les nouveaux visages, car cela entraînait la possibilité que celui-ci soit un espion de la Rébellion. Même si les Capes Blanches avaient beaucoup en commun avec elle, elle ne leur faisait pas confiance. Certains étaient trop rustres, trop vides d'esprit. Ils agissaient souvent sans réfléchir, obéissant seulement aux ordres qui leur seyaient.

Elle fixa donc ce nouveau venu. Il semblait particulièrement jeune. Qu'avait-t-il donc vécu pour en arriver là, si jeune surtout ? Sûrement quelques expériences traumatisantes qui avaient augmenté en lui un ressentiment à toute épreuve, comme chacune des personnes animant les Capes Blanches, ou bien la Rébellion. Beaucoup disaient que c'était par simple plaisir de tuer, de se sentir puissant. Certes cette partie n'était pas négligée, mais en creusant bien on trouvait bien plus qu'une simple envie de pouvoir. Ses yeux gris l'interpella particulièrement. Ils ressemblaient en tout point aux yeux du seïrdan qu'elle avait vaincu la semaine précédente. Elle fronça les sourcils, la méfiance étant à son comble. Alors elle se courba légèrement pour s'incliner et saluer ce nouveau. Mais elle ne le quitta bien des yeux, pour lui signaler sa méfiance et son hostilité. Elle se redressa et engagea la conversation :

Enchantée, je vois que les Capes Blanches gagnent en effectif. C'est bien. Et...quel est donc votre nom ?

Peut-être serait-il surpris d'entendre une voix féminine, quoique déformée par le masque, émaner de ce masque. Haocia était agacée de parler. Entendre le son de sa voix, ce qu'il y avait encore de vrai chez elle, dans sa propre humanité, était quelque chose qui l'énervait particulièrement, c'est pourquoi elle essayait de parler le moins possible. Malgré ça, le ton de sa voix restait impassible, comme ce masque donc les traits restaient figés dans la porcelaine. Le Corbeau pouvait se permettre de discuter un peu avec le jeune homme, car la nuit était longue. Ils auraient tout leur temps pour se livrer aux plus sanglants massacres, après avoir fait un minimum connaissance. Si elle devait dénicher un foyer de rats avec celui-ci, autant savoir à qui elle allait devoir coopérer par la suite.

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Enchantée, je vois que les Capes Blanches en effectif. C'est bien. Et...quel est donc votre nom ?

La voix était sorti d'une femme, elle devait mesurer une vingtaine de centimètres de moins que moi. Son visage était dissimulé par un masque, effet de mode ou soucis pratique, je ne m'en souciais guère. C'était elle qui donnerait les ordres à moi ainsi qu'à mes frères, c'était la seule chose à retenir.

"Je m’appelle Bak'en Roth"

Voila tout ce qu'elle obtiendrait de moi avec cette question. Il fallait avouer que je n'étais pas du genre loquace. Les paroles étaient bonnes pour les humains qui ne savaient pas agir. L'action, voilà tout ce qui m'intéressait, ça et la façon dont j'épaterais la galerie. Je n'étais pas enchanté de faire sa connaissance, je n'en avais rien à faire. Cela ne voulait pas dire que je le négligerais, c'était mon supérieur et j'allais lui obéir aveuglément, comme je l'avais toujours fait. Un de mes confrères pris la parole.

"Quels sont les ordres madame?

Une trace de peur dans sa voie, cette femme devait être puissante. Peu de choses faisaient peurs aux Capes Blanches et si elle en faisait partie, je la respectais! Tout dans le maintien de la femme trahissait son pouvoir, celui qu'elle possédait sur les hommes en général, celui qu'elle exercerait sur moi plus tard. Toutefois, je le ferai sans crainte, ne connaissant pas la femme qui me faisait face et qui me parlait de sa voix métallique.

J'attendais ces ordres, silencieux et la fixant de mes yeux gris, peu de personne savait soutenir ce regard et je savais que si l'officier ne l’appréciait pas je ferai l'objet d'une remontrance publique, trop souvent assimilée à une humiliation par mes confrères. Moi j'en avais subis quelques-une mais à chaque fois, je savais à qui j'avais affaire avec ce regard et le regard des autres n'était pas si important à mes yeux. La seule fois ou je les prenais en compte étant lorsque ceux-ci se faisaient admirateurs...

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